Sénateur de la Marne

Améliorer la lisibilité du droit (2)

Proposition de loi tendant à abroger des lois obsolètes pour une meilleure lisibilité du droit :

. Texte n° 68 (2020-2021) de M. Vincent DELAHAYE, Mme Valérie LÉTARD et plusieurs de leurs collègues, déposé au Sénat le 22 octobre 2020

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires », écrivait déjà Montesquieu.

Pourtant, les lois ne cessent de proliférer dans notre droit et leur nombre s’accroît constamment : des textes nouveaux, de plus en plus volumineux, entrent en vigueur sans que les plus anciens soient nécessairement abrogés en même temps… ni ultérieurement alors même que leur obsolescence de droit ou de fait, et souvent des deux à la fois, serait manifeste. C’est ainsi que bon nombre de dispositions législatives, notamment parmi celles qui n’ont pas été codifiées, ne produisent plus d’effets et ne trouvent plus à s’appliquer concrètement.

Cette sédimentation législative contribue grandement à une inflation normative difficile à mesurer, car le stock de normes en vigueur n’est hélas pas connu avec une totale certitude. Pour ne citer que quelques ordres de grandeur, on dénombrait, en 2019, près de 85 000 articles législatifs en vigueur, correspondant à plus de 12 millions de mots, codifiés pour un peu moins des deux tiers seulement.

Cette situation nuit à la clarté, à l’intelligibilité, à l’accessibilité et à la normativité de la loi, qui sont cependant des objectifs de valeur constitutionnelle.

Dans ces conditions, l’adage traditionnel selon lequel « Nul n’est censé ignorer la loi » est bien éloigné de la réalité… Pour que la loi, expression de la volonté générale, puisse être appliquée par tous, encore faudrait-il quelle soit applicable.

C’est pourquoi les auteurs de la présente proposition de loi ont pris l’initiative du lancement au Sénat d’une mission dite « B.A.L.A.I. » (Bureau d’Abrogation des Lois Anciennes Inutiles) afin de faire la chasse aux « fossiles » législatifs qui ont achevé de produire leurs effets, mais continuent d’encombrer notre paysage législatif. Abroger les lois qui n’ont plus qu’un intérêt archéologique ne peut que contribuer à faciliter l’accessibilité et la compréhension de celles qui sont réellement applicables.

Cette initiative a reçu le plein soutien du Bureau du Sénat et de son Président.

Elle a dores et déjà trouvé une première concrétisation en débouchant sur l’adoption de la loi n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 tendant à améliorer la lisibilité du droit par l’abrogation de lois obsolètes.

Dans une première étape, les auteurs de la présente proposition de loi ont déposé en octobre 2018 une proposition de loi, cosignée par plus de 150 sénateurs, tendant à l’abrogation de 44 lois adoptées entre 1800 et 1940 et devenues aujourd’hui entièrement obsolètes, car n’ayant plus donné lieu depuis plusieurs décennies ni à modification par le pouvoir législatif, ni à exécution par le pouvoir réglementaire, ni à application par un juge.

Après avis du Conseil d’État et examen par la commission des lois, cette proposition de loi a été adoptée par le Sénat en mars 2019, selon la procédure de législation en commission. Son adoption sans modification par l’Assemblée nationale a permis den faire une loi de la République et de parvenir à l’abrogation effective de 49 lois.

La présente proposition de loi a pour objet de poursuivre la démarche ainsi engagée en passant cette fois-ci au crible les lois promulguées entre 1941 et 1980, de la même façon que lavaient été celles adoptées entre 1800 et 1940. Comme dans cette précédente étape, seules ont été sélectionnées les lois qui ont paru pouvoir faire lobjet dune abrogation complète, car ne contenant plus aucune disposition donnant encore lieu à application effective. Pour nombre d’entre elles, il s’agit en fait de lois dont les dispositions ont pour l’essentiel été codifiées ou abrogées et au sein desquelles ne subsistent plus que quelques articles de portée transitoire ou précisant les modalités d’application de dispositions qui ont aujourd’hui disparu de notre droit.

La sélection opérée est le fruit de la même démarche prudente que celle qui avait été menée pour la rédaction de la proposition de loi précédente, consistant à abroger que dune main tremblante… Sans prétendre à l’exhaustivité, elle a conduit à identifier plus de 160 lois manifestement obsolètes.

 

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